tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.

mardi, février 16, 2016

Fabrique-nous un Dieu!




Dans son deuxième roman mythique (Fabrique-nous un dieu!, Éditions François Bourin, Paris, 2016), Georges Lewi  nous entraîne dans des péripéties aussi bibliques qu’actuelles.  Moïse, son personnage principal, découvert abandonné comme  son alter ego de l’ancien Testament, dans un panier d’osier, cette fois non sur la rive du Nil, mais dans une piscine de quartier, est habité par une voix qui lui impose de découvrir une pilule d’éternité qui n’aura l’effet promis à ceux qui y croient que dans le respect d’une éthique évoquant les dix commandements de Dieu. Comment concilier l’imaginaire d’un tel algorithme avec les contraintes réalistes d’une entreprise que doit fonder ce nouveau prophète pour répondre à la demande impatiente de ses fidèles? Et dès lors, comment s’accommoder des promesses chimériques  inhérentes au marketing sans lequel tout succès commercial est exclu? Le lecteur est aspiré dans le rythme de ce roman sans pouvoir lâcher prise, car les disciples de cette possible réincarnation de Moïse plongée dans le monde le plus actuel et trivial, eux-mêmes confrontés à leurs passions humaines autant qu’aux logiques du marché, attendent tout de lui, oscillant entre la foi et le doute, créant un imbroglio à rebondissements incessants.  

En mythologue expert du marketing, ce nouveau Veau d’or où il sait retrouver l’écho actuel des vieux récits humains, ceux du désir et de la peur qui fondent notre besoin de croire contre toute évidence, Georges Lewi  fait résonner ce même imaginaire collectif qui fondait jadis les mythes et demeure aujourd’hui le ferment de toute démarche de branding et de marketing.  On se saurait mieux actualiser l’histoire du grand Moïse et l’archaïsme de l’âme humaine. A ceux qui croient dans la puissance de la divergence le mythologue Georges Lewi montre la puissance de la répétition au cœur même du changement. Et comme tout imaginaire, Moïse confronté finalement au principe de réalité, s’évanouira dans le vide, laissant ceux qui ont cru en lui face à eux-mêmes et à l’impossible rédemption.

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